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Séminaire national. Mars 2012

Publié le 29 mars 2012

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Le  jeudi 29 mars 2012

Comment analyser la structure sociale ?

Séminaire national (mars 2012). M. Gosse

  • Compte rendu du séminaire national du 19 mars 2012 sur les nouveaux programmes de terminale.

    Atelier : Comment analyser la structure sociale ?

     

    A)    Le programme officiel.

     Notions :

    Classes sociales, groupes de statut, catégories socio-professionnelles.

     Indications complémentaires :

    On présentera les théories des classes et de la stratification sociale dans la tradition sociologique (Marx, Weber) ainsi que leurs prolongements contemporains et on s’interrogera sur leur pertinence pour rendre compte de la dynamique de la structuration sociale. On mettra en évidence la multiplicité des critères de différenciation sociale dans les sociétés post-industrielles (statut professionnel, âge, sexe, style de vie) et on se demandera dans quelle mesure cette multiplicité contribue à brouiller les frontières de classes.

    Acquis de première : groupe social.

     B)    Proposition d’interprétation du programme.

    La question centrale de ce thème est la pertinence du concept de classe sociale face aux évolutions contemporaines de la structure sociale.

    Dans l’ancien programme, on établissait en première la distinction entre perspective nominaliste et réaliste des classes sociales. En terminale dans le thème sur la stratification sociale et notamment dans le traitement des inégalités, ce concept était réutilisé pour montrer la baisse séculaire des inégalités et aborder les notions de polarisation et de moyennisation. Il y avait une certaine redondance entre les notions abordées en classe de première et de terminale. Le nouveau programme permet d’éviter les répétitions. Dans ce nouveau programme, il est intéressant d’aborder  ce thème en incarnant  les questions théoriques dans la réalité contemporaine. On va concilier la réflexion théorique en terme de notion de classe, de pertinence de classe et l’évolution de la structure sociale.

    Trois axes sont proposés pour traiter ce thème :

     -          Une présentation de la tradition sociologique sur l’analyse de la stratification sociale : le concept de classe sociale analysé par K Marx et par M Weber, et l’introduction de l’espace social de P Bourdieu. Trois types de modèles théoriques que les élèves doivent maîtriser.

    -          Une réflexion sur les prolongements contemporains dans l’analyse des classes. Il faut essayer d’incarner le questionnement actuel dans la notion de classe. Le concept de classe est – il toujours pertinent ? Si oui, quel concept de classe retenir ?

    On assiste à un glissement de la classe ouvrière à celle de classe populaire. Il y a également la question des classes moyennes mais aussi celle des élites et des catégories aisées. On peut mobiliser les travaux de L Chauvel, F Dubet, O Schwartz, M Pinçon-Charlot.

    -          Les PCS comme les classes sociales doivent être repensées face aux évolutions de la structure sociale. On peut s’intéresser au débat portant sur l’ ESEC, projet européen de classification socio-économique appelé à se substituer à la nomenclature des PCS de l’INSEE pour couvrir l’ensemble des pays de l’Union européenne. La question sous –jacente étant de savoir si les grilles de classification rendent bien compte de la structure sociale.

     

    Partie I : Présentation de l’analyse de la classe sociale chez K Marx et  M Weber.

    Il est intéressant  dans cette partie, de confronter les grilles d’analyse des auteurs avec l’évolution historique de la structure sociale.

    Premier élément de la tradition sociologique : l’analyse marxiste des classes sociales.

    On présentera les fondements théoriques de la notion de classe sociale chez K Marx et  notamment  la convergence vers un système à deux classes opposées. L’idée de conflit central est  importante. La bipolarisation permet de mettre en avant l’analyse historique de Marx. On peut poser la question de l’actualité de cette analyse. L’analyse de Marx a t – elle encore un sens aujourd’hui ? Elle pose le problème de la question de l’intégration des classes moyennes. Le modèle de société proposé par K Marx est un modèle qui est historiquement daté. Il faut distinguer le modèle de structure et la notion de classe sociale. L’idée de structure sociale présentée par K Marx peut être interrogée dans le monde contemporain mais la notion de classe sociale définie par Marx peut être reprise (distinction de classe en soi et de classe pour soi). Il est intéressant de confronter les grilles d’analyse des auteurs traditionnels à l’évolution historique des structures sociales.

    Deuxième élément de la tradition sociologique : l’analyse weberienne des classes sociales.

    La notion de groupe de statut fait partie des notions abordées dans le nouveau programme de terminale. La classe sociale dans l’analyse de M Weber n’est qu’un des éléments d’échelle de l’analyse de la structure sociale. L’intérêt de la notion de groupe de statut est la dimension de prestige, d’honneur social qui permet de marquer la distinction avec la notion de classe sociale de K Marx. Il est intéressant de montrer l’aspect multidimensionnel de la théorie de Weber. L’apport du symbolique chez M Weber est important à travers la notion de groupe de statut.

    Il est nécessaire également de montrer aux élèves que si le conflit est un élément important et constitutif chez  K Marx dans l’analyse des classes sociales, chez M Weber il n’est pas nécessaire et reste un élément de probabilité.

    L’opposition nominaliste/ réaliste de l’analyse des classes sociales est aussi un aspect à développer. Elle renvoie à la question suivante : Peut – on saisir les classes sociales empiriquement ou pas ? Ont – elles une existence réelle ?

    Troisième élément à développer : l’analyse de P Bourdieu.

    L’analyse de P Bourdieu permet de travailler la notion de domination déjà présente chez M Weber. Les classes sociales sont inégalement dotées en capital global, capital économique, capital culturel, capital social. C’est la structure interne des capitaux dans l’analyse de P Bourdieu qui détermine la position sociale dans l’espace social. La notion de classe sociale est virtuelle. Il s’agit d’une approche nominaliste. La classe sociale est construite par le sociologue mais elle peut prendre un sens empirique si les acteurs se l’approprient. On peut poser la question suivante : Comment ces catégories sont – elles réinvesties par les acteurs ?

    Ce triptyque de la tradition sociologique est à présenter aux élèves pour que les distinctions essentielles soient posées.

     

    Partie II : Regards contemporains.

    Cette partie peut être articulée autour de la problématique suivante : la pertinence des classes sociales aujourd’hui.

     

    Plusieurs éléments amènent à remettre en cause la notion de classe sociale aujourd’hui :

     -          L’évolution de la société économique.

    L’individualisation des rapports de production se traduit par une multiplication des formes de rémunérations, des contrats de travail (CDD, CDI, Intérim, temps partiel..), des statuts et brouille les frontières notamment entre ceux qui possèdent et ceux qui ne possèdent pas. L’exclusion introduit une nouvelle entité.

    -          Le découpage de classe traditionnelle semble moins pertinent avec l’affaiblissement de la conscience de classe et une relative homogénéité des modes de vie. On peut parler d’un effritement de la classe ouvrière (dispersion du vote ouvrier, plus d’homogénéité culturelle, moins de grandes mobilisations collectives).

    -          Les clivages de genre, âge, génération. Ils se superposent au clivage traditionnel de classes et brouillent les lignes de fracture.

     

    La réalité de la structure sociale invite à se poser des questions.

    -          On observe un glissement de la classe ouvrière à la classe populaire.

    L’ensemble de ce groupe est devenu plus large et plus flou. Dans les classes populaires, on a tendance à mettre employés et ouvriers à l’intérieur d’un même ensemble. Or le destin social de ces deux groupes n’est pas forcément similaire.

    On peut aussi analyser la classe ouvrière de deux façons : comme un groupe trop éclaté pour pouvoir être saisi empiriquement  (F Dubet) ou insister sur le « destin commun de dominés » qui caractérise ce groupe (O Schwartz).

    -          La notion des classes moyennes : le commun l’emporte t- il sur le particulier ?

    Les classes moyennes sont marquées par une grande fragmentation, ce qui rend difficile leur définition. On peut mobiliser l’analyse de L Chauvel en montrant qu’il est possible de penser les classes moyennes avec un destin commun uni dans une logique de déclassement. Pour L Chauvel, ce qui structure cette classe c’est ce sentiment de fragilisation et la peur du déclassement.

    E Maurin, Dominique Goux « Les nouvelles classes moyennes » 2012, dans leur ouvrage, montrent que le sentiment de déclassement est certes commun aux classes moyennes mais pour eux, il est fantasmé, surévalué.

    On peut ainsi montrer aux élèves que les sociologues ne parviennent pas à une définition commune des classes moyennes. Ce qui amène au questionnement suivant : Peut – on saisir les classes moyennes empiriquement ou sont – elles seulement des concepts ?

    -          Élites et catégories aisées.

    On peut mobiliser les travaux de Monique et Michel Pinçon –charlot qui montrent l’existence d’une conscience de classe dans la grande bourgeoisie. On peut également utiliser les travaux de T Picketty pour mettre en évidence les inégalités de revenus et de patrimoine.

    Dans cette partie, il est important de ne pas présenter un catalogue d’analyses et d’enquêtes mais il faut montrer que la réalité de la structure sociale invite à se poser des questions dont on peut trouver une traduction dans ces trois groupes de société.

     

    Partie III : Les PCS comme les classes sociales doivent être repensées face aux évolutions de la structure sociale.

    Dans cette partie, on pourra présenter aux élèves la nomenclature des PCS de l’INSEE en énumérant les critères de classification (statut, profession, secteur d’activité, niveau de qualification etc.). On peut montrer que cette approche est plus réaliste mais que néanmoins les éléments retenus ne sont pas neutres. On peut aussi évoquer son évolution et le projet de classification sociale commun à l’échelle européenne ESEC.

    On pourra expliquer que parmi les difficultés à élaborer une grille européenne, il y a  la définition de la catégorie des cadres. Elle est une construction sociale et historique qui existe en France mais  pas en Allemagne et en Angleterre.

     

    Bibliographie proposée:

    •  S Bosc, Stratification et classes sociales, coll Cursus, ed A Colin, 2010.
    • L Chauvel, Les classes moyennes à la dérive, Seuil, coll « La république des idées » 2006.
    • S Bosc, « Les classes moyennes », Revue problèmes politiques et sociaux n°938-939, juillet-août 2007.
    • Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, La vie dans les beaux quartiers, Seuil, 1989.

     Activités proposées autour de trois thèmes :

    • La bourgeoisie : dernière classe sociale ?
    • Âge et structure sociale : « La jeunesse n’est qu’un mot ».
    • Est – ce que les cadres sont une catégorie pertinente ?