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2014

Publié le 16 nov. 2014

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Le  dimanche 16 novembre 2014

Silver économie

Cr Jéco 2014. L. Auffant

  • Jéco 2014

    Jeudi 13 Novembre 2014

    15h – 16h30 : silver économie, retraite dorée ?

    Compte rendu de L. Auffant, Aix-Marseille

     

    Intervenants :

    • Michèle Debonneuil, Inspecteur général des Finances
    • Clément Lecuivre, Directeur du département études, planification stratégique et développement durable de la Caisse des Dépôts et Consignations.
    • Jean-Paul Nicolaï, chef du département économie-finances à France Stratégie (commissariat général à la stratégie et à la prospective)
    • Fabien Verdier, conseiller en charge de la politique de l’âge auprès du Ministre des affaires sociales
    • Alain Villemeur, ingénieur, économiste et essayiste
    • Nadia Frontigny, directrice dévelopement silver economy, Orange Healthcare

     

    Modérateur : Jean-Paul Chapel, journaliste France 2

     

     Première partie : enjeux de ce thème présentés par les intervenants

     

    Nadia Frontigny :

    Définition de la silver économie : ensemble des activités économiques liées à un grand changement sociétal qui concerne un grand nombre de pays : le vieillissement de la population.  Ex de secteurs concernés : le tourisme (les touristes sont de plus en plus âgés), les transports (marches de bus plus basses), l’action sociale et médico-sociale.  Les métiers de l’action sociale ont des transformations à opérer. Les industriels du numérique (ex : Orange) ne peuvent pas tout faire seuls (financement par ex).

    Il existe trois grands types de personnes âgées :

    -          Actives : utilisent déjà le numérique
    -          Fragiles
    -          En perte d’autonomie (hôpitaux, EHPAD)

    Que fait l’entreprise Orange ? Par exemple elle assure la communication entre les patients dans une chambre d’hôpital et les soignants (sonnette pour appeler le personnel), la télémédecine, la télésurveillance à domicile. Il s’agit d’accompagner des personnes vieillissantes, de parfois leur éviter des déplacements, d’assurer le suivi après une hospitalisation.

    Ex du suivi en Auvergne des patients du réseau cardiauvergne : suivi du poids à distance afin d’éviter des hospitalisations.

    Ex en Isère : projet Autodomadom

     

    Fabien Verdier :

    À quoi renvoie la silver économie ? Quels enjeux pour la France ?

    Objectif de créer une filière industrielle du vieillissement compétitive, dynamique et de développer des activités liées aux séniors.

    Autre enjeu : orienter l’épargne des personnes âgées vers une épargne plus productive : ETI, PME.

    Concevoir et créer des produits et technologies pour les séniors ou au service des séniors : numérique, domotique, logiciels adaptés, appareils adaptés (vue, ouïe), vêtements particuliers, aliments spéciaux (ex : pains protéinés pour séniors), ascenseurs…

    Ce créneau est porteur : en France : 15 millions de séniors (= 60 à 120 ans), 180 millions en Europe, 1 milliard dans le monde. Tous les continents, sauf  l’Afrique, vieillissent. Le nombre de séniors devrait atteindre 2 milliards en 2050 et le nombre de plus de 80 ans devrait tripler d’ici là.

    La silver économie représente un fort levier de croissance  tourné vers toutes les entreprises : PME, ETI... L’objectif est de créer des filières régionales compétitives (des silver régions) et des clusters dans le domaine de la silver économie (= les gérontechnologies : cf. site du ministère des affaires sociales). Démarche initiée avec Mme Michèle Delaunay (de 2012 à  avril 2014)

    http://www.social-sante.gouv.fr/espaces,770/personnes-agees-autonomie,776/dossiers,758/adaptation-de-la-societe-au,2971/adaptation,2973/adapter-les-politiques-publiques,17312.html

     

    Michèle Debonneuil :

    La silver économie concerne non pas des biens et des services mais un bouquet de solutions (secteur quaternaire) = des réponses à des besoins connus par des informations collectées ou captées. Es tâches peuvent être automatisées grâce à des données captées. On expérimente des façons de satisfaire les besoins des personnes âgées qui pourront ensuite être  élargies à l’ensemble de la population (= sources de croissance). Les conditions de réussite de la production de ces produits est liée à la division du travail, à l’introduction de logiciels qui feront toutes les tâches automatiques et répétitives (ex : les contrôle d’effectivité : vérifier que l’aide-soignante est passée). Toutes ces tâches doivent être enchaînées et réparties entre les régions alors que pour l’instant trop de tâches sont répétées dans chaque région : les coûts fixes ne sont pas amortis.

     

    Jean- Paul Nicolaï :

    Le vieillissement équivaut au développement des classes moyennes dans les pays en développement. On a un fort taux d’épargne à canaliser dans un investissement productif pour réussir, se développer. On a alors deux enjeux : avoir de l’épargne, et la transformer en quelque chose de productif.

    Dans l’avenir on aura beaucoup d’épargne car le taux d’épargne des séniors est plus élevé que la moyenne pour différentes raisons : hausse de l’espérance de vie, faire face au risque de dépendance, incertitudes pour l’avenir de ses enfants… Macroéconomiquement le financement du vieillissement est possible quand on voit le niveau d’épargne, cependant il faut canaliser l’excès d’épargne vers les investissements. En effet, pour l’instant l’épargne est souvent thésaurisée et on a peu de placements productifs. Il faut également souligner l’hétérogénéité chez les séniors. Globalement le taux d’épargne est élevé, le patrimoine est élevé surtout car les séniors possèdent leur maison. Le viager ne fonctionne pas (film, expérience de Jeanne Calment et de son notaire, frein psychologique : pari sur la mort d’une personne…). Une solution consiste à créer des viagers mutualisés. Il faut aussi développer des produits d’épargne pour les vieux, pour collecter leur épargne et favoriser les investissements productifs privés. L’assurance dépendance reste à développer. Il existe des produits pour préparer sa retraite mais pas vraiment de produits spécifiques à l’épargne des séniors.

     

    Clément Lecuivre :

    Le vieillissement n’est pas qu’un problème, c’est une opportunité économique sur le plan de l’innovation (nouveau service), c’est une chance (coexistence de 4 voire 5 générations).

    Le vieillissement n’est pas homogène : tous les cas individuels sont différents : dynamisme, déclin dépendance et donc les besoins sont différents selon la situation de santé, le lieu d’habitation, les revenus…

    Nous sommes dans un phénomène de transition : il faut savoir préparer la transition, l’accompagner, développer un secteur d’offre adapté aux nouveaux besoins (cf. expérience d’Orange).

    Il est nécessaire de trouver les nouvelles ressources : les séniors ont besoin de ressources complémentaires pour assurer le maintien de leur niveau de vie de quand ils étaient actifs, pour faire face à de nouvelles dépenses (notamment coût de la dépendance). Comment trouver ces ressources ? En mobilisant une partie de plus en plus importante du patrimoine des personnes âgées. ¾ des plus de 70 ans sont propriétaires de leur logement. La CDC a créé un fonds d’acquisition de logements en viager mutualisé pour assurer un complément de revenus aux personnes âgées.

    On doit innover pour répondre à une nouvelle demande de biens et de services à la personne en sachant que c’est un secteur hétérogène, éclaté, essentiellement tiré par les besoins liés à la dépendance. Dans l’avenir ces besoins devront être mieux intégrés dans un bouquet de services. Ex d’initiatives tirées du « care management » : métiers de proximité de personnes chargées de mettre en relation différents services : relation avec les soins, soins à domicile, accès aux technologies.

     

    Alain Villemeur :

    Il n’y a pas de consensus sur le financement du vieillissement : cf. projet de N Sarkozy de créer une branche dépendance de la sécurité sociale (notamment financée par une assurance payée par les plus de 50 ans). Aujourd’hui une nouvelle contribution a été créée : la CASA (contribution additionnelle en faveur de l’autonomie et de la dépendance : http://www.pensions.bercy.gouv.fr/actualite/pr%C3%A9l%C3%A8vement-%C3%A0-compter-du-1er-avril-2013-de-la-contribution-additionnelle-en-faveur-de-lautonomie-et )

    La CASA représente environ 650 millions d’euros ce qui est significatif mais insuffisant car inférieur aux besoins. Où trouver d’autres ressources ? Exemple de la Suède et comparaison par rapport à la France : la Suède consacre 3,7 % de son PIB à l’autonomie des personnes âgées et à la dépendance (contre 1,7 % en France) mais la France consacre 2 points de PIB de plus que la Suède aux retraites. En Suède, la retraite est à 65 ans. Un des moyens de financer la dépendance est donc de travailler plus longtemps  car on a alors plus de cotisants et moins de dépenses pour les retraites.

    Autre source : le viager. En France on a environ 5000 nouveaux viagers par an : le viager a mauvaise presse. Si on s’alignait sur le niveau des EU on en aurait 60 000 à 70 000, et on dégagerait 5 milliards d’euros par an. La forme moderne de viager est le viager mutualisé partiel. Les pouvoirs publics auraient tout intérêt à provoquer une réforme importante du viager.

     

    Deuxième partie : réponse aux questions de l’auditoire

     

    1 / Comment fonctionne le fonds d’investissement en viager de la CDC ?

    Clément Lecuivre : c’est un contrat viager classique mais un peu modifié car l’acheteur est un groupe d’investisseurs institutionnels. En France on a plusieurs types de freins face au viager : freins psychologiques… et  aussi les interrogations sur la solidité financière de l’acheteur du viager. Le fonds de la CDC apporte la garantie financière. Pour l’instant, il s’agit d’une expérimentation : le fonds expérimental est doté de 120 millions d’euros et les régions concernées sont l’Ile de France et PACA ainsi que quelques grandes agglomérations. Aux USA le viager est porté par les autorités locales, cela change tout.

    Attention ce n’est pas un mécanisme de création monétaire comme la planche à billets car on a un actif derrière : le patrimoine immobilier. Il s’agit de liquéfier le patrimoine.

     

    2 / Pourquoi les jeunes paient-ils toujours pour les vieux ?

    Alain Villemeur : Débat en 2010 sur la dépendance : pas de consensus pour savoir si les jeunes devaient contribuer. Aujourd’hui la nouvelle contribution (CASA) n’est pas payée par les jeunes, elle s’applique aux retraités imposables.

     

    3 / Pourquoi aucune publicité n’est faite pour des produits d’épargne spécifiques aux séniors ?

    Jean-Paul Nicolaï : préconisation pour créer un « livret argenté » : produit d’épargne répondant aux besoins des personnes âgées (liquidité, niveau de risque) et si possible défiscalisé (Bercy pas forcément d’accord pour la défiscalisation).

    Alain Villemeur : la prise de conscience arrive. Le patrimoine immobilier français est un des plus importants de l’UE. On hérite de plus en plus tardivement (55_60 ans) et ce niveau va s’accélérer. Le patrimoine est fortement concentré chez les plus de 60 ans. La question est d’orienter ce patrimoine vers des investissements plus risqués et plus productifs.

     

    4 / Quel sens donner au mot sénior (60 à 120 ans) ?

    Jean-Paul Nicolaï : parfois on descend même jusqu’à 55 ans. Le terme changera de sens au cours du temps.

    Michèle Debonneuil : ce vocable « sénior » est périmé. On a une logique de besoins (le plus important est d’adapter un produit aux besoins individuels) et non pas une  logique d’âge.

    Alain Villemeur : Ce sont les besoins qui conduiront à la définition des séniors : mot valise parfois remplacé par « aînés » mais recouvrant des réalités différentes : maladie, handicap…