Les mots du confinement

Publié le 4 mai 2020

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Le  lundi 4 mai 2020

Les mots du déconfinement.

Déconfinement

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    Déconfinement

    C’est un de ces mots nouveaux que le contexte de pandémie a créés. Notons, en effet, que si « confinement » est bien dans le dictionnaire, « déconfinement » est un néologisme. Autre constat qui trace une différence nette avec la mise en place du confinement : sortir d’une pandémie — ou plutôt tenter d’en sortir — est une réalité si extraordinaire qu’il est impossible de prendre appui sur des références historiques — les guerres ou les pandémies passées comme cela a été le cas avec l’installation du confinement — pour penser la sortie du confinement.

    Il est plus facile de dire ce que ne sera pas le déconfinement scolaire que d’annoncer ce qu’il sera. Ce ne sera pas tout à fait une rentrée ! Une date a bien été fixée, mais elle vient bien après la rentrée du troisième trimestre ; il s’agit plutôt d’un « retour dans les classes », d’une « reprise des cours » et, sans doute, pas pour tous les élèves, ni vraisemblablement pour tous le même jour et probablement avec un emploi du temps aménagé. C’est que le virus sera toujours là ! Si dans les jours qui ont précédé le confinement, on pouvait douter de la présence du virus et de sa virulence, il n’en est plus question aujourd’hui. La stabilisation de la contagion à un niveau élevé maintient la crainte d’une nouvelle flambée épidémique et d’un rétablissement du confinement. En conséquence, ce ne sera pas la fin des gestes barrières !

    Si la prudence s’impose, l’impatience d’une « réouverture » des écoles, des collèges et des lycées s’exprime de plus en plus nettement. Une représentation bien établie fait de l’École un sanctuaire ; non pas un lieu de culte, mais un espace protégé, épargné des vicissitudes qui affectent le reste de la société ; un refuge suffisamment sûr pour que les acteurs de la communauté éducative accomplissent leurs missions. Celles-ci sont au nombre de trois.

    Dans les premiers temps du confinement, la question des examens s’est d’emblée posée. À juste titre ! La mission de l’École n’est-elle pas de préparer les enfants et les adolescents aux responsabilités qui seront les leurs dans l’avenir ? Cependant, ce problème s’est finalement avéré le plus facile à résoudre ; à la condition toutefois que les procédures d’orientation soient clarifiées, le contrôle continu pourra se substituer aux épreuves terminales. L’autre question est souvent abordée sous l’angle des inégalités. La continuité pédagogique mise en place dès le début du confinement bute sur l’exclusion d’une frange d’élèves — certes étroite, mais bien réelle — à des moyens numériques. Il y a là une rupture d’égalité qui compromet l’une des fonctions majeures de l’École qui est de créer et d’entretenir un sentiment d’appartenance collective grâce à l’accueil de tous les enfants. Enfin, s’il est une mission dont la crise sanitaire a révélé l’importance, c’est bien la transmission. Si parents et enseignants partagent des tâches éducatives, il est plus difficile aux premiers de concevoir, de mettre en œuvre et d’évaluer les moyens d’une transmission à laquelle ils n’ont pas été formés. Enseigner est un métier ! De toutes les missions qu’accomplit l’École, celle qu’il est à la fois la plus nécessaire et la plus délicate à mener est, incontestablement, la transmission. Apprendre à chacun à penser par soi-même, former l’esprit critique en prenant appui sur les enseignements — tous les enseignements ! — ne s’improvise pas. À la faveur de l’enseignement à distance, beaucoup de parents ont pris conscience qu’enseigner était un métier et qu’on ne pouvait pas s’y former en quelques heures, ni même en quelques semaines.

    Le 11 mai ne sera pas une rentrée. Certes ! Mais il y a fort à parier que le retour dans les classes sera ausculté avec plus d’attention qu’une rentrée classique. L’enjeu est de taille. Le déconfinement ouvre une phase d’expérimentations dont le succès est indispensable pour que se maintienne la confiance dans l’École.

    Article réalisé par Gérald ATTALI, IA-IPR HG