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Publié le 5 nov. 2022

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Le  samedi 5 novembre 2022

L’argumentation en sciences de la vie et de la Terre : un apprentissage progressif

Du cycle 4 au baccalauréat comment construire cette compétence complexe avec les élèves

  • nuage de mots argumentation

    Les enjeux de l’argumentation

     

    L’école doit donner à tous les élèves, les clés pour devenir des citoyens aptes à faire des choix collectifs et individuels éclairés, doués d’esprit critique et capables d’argumenter. La science doit être enseignée comme un grand récit rationnellement argumenté du monde et non comme un récit révélé afin d’imbriquer ce que dit la science et ce pourquoi la science dit ce qu’elle dit (argumentation scientifique). Faire comprendre la nature de l’argumentation scientifique et entraîner à sa pratique en développant des compétences d’argumentation est un objectif de formation central pour les élèves.

     

    L’actualité récente, dans le domaine de la santé comme de l’environnement, montre que le discours scientifique et plus largement la pensée scientifique sont régulièrement remis en cause et relégués au statut d’opinion voir de croyance sur les réseaux sociaux mais également dans les médias. Diffuser les bonnes pratiques de l’utilisation des médias est fondamental, et pourtant ce n’est pas suffisant, car les difficultés ne viennent pas que de notre crédulité face aux sources trompeuses et aux arguments persuasifs.

     

    Le développement de l’esprit critique passe donc inévitablement par la prise de conscience des limites naturelles de notre raisonnement et par l’acquisition d’outils pour le rendre plus aiguisé. Une compétence des programmes présente dès le cycle 3 vise à distinguer ce qui relève d’une opinion ou d’une croyance ; de nombreux outils sont présentés sur le site académique « Développer l’esprit critique ».

     

    Les enjeux de l’argumentation sont multiples :

    • Construire une pensée scientifique en analysant ou en pratiquant des démarches tout en exerçant son esprit critique,
    • Faire vivre sa dimension sociale : l’expression de cette pensée scientifique se fait avec l’autre : écoute, confrontation et débat sont la base de la construction collective des savoirs scientifiques,
    • Pratiquer des langages à l’oral comme à l’écrit avec une communication permanente au cours de la démarche.

     

     

     

    schéma enjeux de l'argumentation 

    L’enseignement des sciences à l’école doit donc dispenser une formation scientifique solide qui intègre nécessairement l’apprentissage de l’argumentation permettant d’exercer son esprit critique pour identifier les faits ou preuves (observations, mesures, modèles, données expérimentales…) qui fondent le discours scientifique pour répondre à un problème ou une question scientifique. Cette réponse argumentée ne saurait se limiter à une explication uniquement fondée sur des notions qui s’imposeraient comme des dogmes même si elle repose sur un bagage cognitif très important ; en effet sans connaissances, il est impossible d’argumenter !

     

    L’argumentation scientifique : un outil de construction des savoirs et un objet d’étude en sciences de la vie et de la Terre

     

    En sciences de la vie et de la Terre, l’apprentissage long de l’argumentation ne peut être réalisé que par sa pratique très régulière et explicite avec des attendus progressifs tout au long de la scolarité des élèves.

    Dès le cycle 3, les outils permettant d’argumenter en sciences sont manipulés, les élèves découvrent de nouveaux modes de raisonnement, apprennent à distinguer opinion et croyance et mettent en œuvre des démarches scientifiques variées.

     

    Ainsi, l’argumentation est à la fois un outil pour construire les savoirs scientifiques et un objet d’étude pour apprendre une modalité de pensée qui ne saurait se résumer à la mise en œuvre d’une démarche expérimentale stéréotypée construite avec un raisonnement obligatoirement hypothético-déductif (voir l’article Du modèle OHERIC de démarche vers la construction d'une véritable pensée scientifique). 

    Cette pensée scientifique doit être présentée sous la forme d'un raisonnement structuré qui argumente et explique des notions à valeur générale, à partir de faits ; il ne s’agit donc pas d’asséner des notions sans argumentation, et encore moins de lister des exemples sans chercher à en généraliser la portée. Pourtant, les correcteurs ont pu constater lors de la session du baccalauréat 2022, pour l'exercice écrit de type I, que beaucoup de candidats n’argumentent pas ; en effet le développement prend la forme d’un récit où sont juxtaposées des généralités dogmatiques mal étayées. 

     

    Focus... Comment apprendre à apprendre à construire une démarche personnelle argumentée ?

     

    Là encore, aucune méthode procédurale ne permet un tel apprentissage. Construire une démarche scientifique de manière autonome est un apprentissage long et complexe ; et bien souvent dans la classe, seul l’enseignant en est capable.

     

    Il est donc indispensable de rendre explicite pour les élèves ce travail de construction de la démarche réalisée par l’enseignant lors de la préparation de sa séquence d’enseignement. Cette démarche aura davantage de sens pour les élèves, et cela ne pourra que renforcer les apprentissages.

     

    Quelques exemples pour cet objectif d’apprentissage spécifique en classe :

     

    - Présenter la démarche enseignée en amont,

    - Justifier les choix opérés (ordre, exemples, expériences, ….) en amont ou en cours d’activité (par l’enseignant et/ou avec les élèves),

    - Présenter les différentes activités inhérentes à la problématique construite en amont et demander aux élèves de justifier ces choix,

    - En fin de séquence, faire un retour sur la problématique scientifique posée au départ et proposer aux élèves de la décliner en divers questions scientifiques plus restreintes. Les arguments construits dans la séquence pourront alors utilement être reliés aux différentes questions voir complétés par de nouveaux.

     

     

    Par ailleurs, la trace écrite des élèves doit être le reflet de cette démarche aussi un découpage morcelé avec l’activité (problème, objectifs, ressources, compte rendu) suivi d’un « bloc » de connaissances organisées dans un plan scientifique ne saurait convenir ! En effet, il existe 2 écueils à cette pratique :

    - D’une part, les élèves lors de leurs révisions auront tendance à concentrer leur effort sur l’apprentissage du bloc de connaissances qu’ils restitueront alors de manière dogmatique sans argumenter.

    - Et d’autre part, en ne faisant pas d’aller-retour entre activité et connaissances, les élèves ne perçoivent plus la construction de la démarche scientifique de l’enseignant.

     La trace écrite doit permettre à l’élève, seul chez lui, de retracer la logique de la construction de son savoir et de comprendre la fonction des activités dans la démarche. Ainsi les éléments suivants doivent apparaître dans la trace écrite de l’élève :

    *La démarche scientifique doit être clairement identifiable et l’élève doit comprendre la fonction des activités dans la démarche : comprendre ce qu’il fait et pourquoi il le fait.

    *Les éléments de transition, pour passer d’un paragraphe à un autre, doivent être présents.

    *Le plan peut venir en appui, et doit être en cohérence, avec la démarche suivie.

    *Les connaissances construites tout au long de la démarche sont mises en relief (couleur, souligné, entouré, surligné, encadré…) sans formatage dans un paragraphe bilan. Cependant, il peut être intéressant, par exemple lorsque la quantité et/ou la complexité des notions est grande, de demander aux élèves de les organiser (temps de travail personnel dans ou hors la classe) dans une synthèse argumentée alliant notion et argument (paragraphe écrit, schéma bilan, carte heuristique…). Voir article « éléments de réflexion autour de la trace écrite ».

     

     

    Seule, la mise en œuvre de modalités pédagogiques variées alternant l’apprentissage de l’argumentation comme outil et objet peut viser l’acquisition de ses diverses dimensions :

    • On peut fournir à l’élève le modèle testé, l’argument à utiliser et la conclusion à en tirer : on évalue alors la mise en œuvre du raisonnement.
    • On peut fournir un modèle et l’observation ou le résultat expérimental : on évalue la confrontation du fait et du modèle, l’éventuelle correction du modèle.
    • On peut fournir simplement le modèle : on évalue l’imagination qui permet de mettre au point un test, sa mise en œuvre pratique, l’interprétation proposée pour le résultat du test.

     

    En sciences de la vie et de la Terre l’argumentation est le plus souvent bâtie à l’aide d’arguments logiques construits par observation-comparaison et empiriques fondés sur l’expérience ; ils ne peuvent exister sans une observation de la réalité : les liens de causalités, les exemples, ou les modèles sont des relations d’expérience possibles. Elle peut être entendue comme un raisonnement logique pour répondre à un problème ou une question scientifique en mobilisant des arguments construits sur la base de faits. L’argumentation a pour but de convaincre de la validité d’un propos sans qu’il ne s’agisse d’une vérité à établir comme c’est le cas pour la démonstration qui, elle, repose sur des arguments de vérité. Les arguments sont le plus souvent illustrés par des exemples qui rendent le propos plus concret, plus compréhensible, et donc plus efficace. Ces exemples peuvent être tirés de l’observation, de l'expérience ou du modèle.

     

    L'ensemble d'une argumentation est structuré de manière cohérente. On doit pouvoir en saisir les articulations logiques et comprendre le déroulement du raisonnement. Cette capacité de structuration de l'argumentation est un apprentissage à mener à part entière pour "apprendre à apprendre à structurer son argumentation orale ou écrite". Attention, il n’est pas question non plus d’en faire une « méthode » dont il suffirait de suivre une recette en ajoutant des ingrédients chaque année. Mais bien de développer des compétences d’argumentation dans le cadre de contextes d’apprentissages de plus en plus complexes :

    • Concept scientifique plus ou moins nouveau avec un plus ou moins grand nombre d’inférences à construire,
    • Nombre de tâches et difficulté inhérente à chacune plus ou moins grande pour la construction de la démarche,
    • Guidage et étayage plus ou moins important sur tout ou partie de la démarche pour limiter la charge cognitive (voir l’article La théorie de la charge cognitive).

     

     

    Exemples illustrés pour une construction progressive des compétences argumentatives en sciences de la vie et de la Terre du cycle 3 à la classe de terminale enseignement de spécialité

     

    L’apprentissage de l’argumentation scientifique, initié en cycle 3, se poursuit du cycle 4 à la classe de terminale avec des jalons d’évaluation certificative à l’oral (DNB, grand oral, phase spécifique des ECE) et à l’écrit (DNB, baccalauréat : synthèse argumentative type I ou résolution d’un problème à partir d’un corpus documentaire type II) pour atteindre divers objectifs d’apprentissages (non exhaustif ou limitatif) :

     

    mceclip0 - 2022-11-03 09h22m31smceclip1 - 2022-11-03 09h23m22s
    Identifier, comprendre et expliquer les liens de corrélations ou causalités
    mceclip0 - 2022-11-03 09h22m31smceclip3 - 2022-11-03 09h24m09s
    Présenter et expliciter sa démarche en justifiant ses choix stratégiques
     
    Exercer un recul critique sur la mise en œuvre de sa démarche ou les résultats obtenus en les confrontant au savoir établi
     
    Repérer et comprendre comment dans un contexte historique, une étape essentielle dans l’amélioration d’un modèle ou d’une théorie a été réalisée grâce à un argument nouveau
     
    Convaincre lors d’une interaction en écoutant l’autre et en tenant compte de ses arguments

     

     

    mceclip1 - 2022-11-03 09h23m22smceclip2 - 2022-11-03 09h23m44smceclip3 - 2022-11-03 09h24m09s

     

    Répondre à une question scientifique grâce à un raisonnement logique construit en mobilisant des faits, des données :
     
    Distinguer ce qui relève d’une croyance ou d’une opinion et ce qui constitue un savoir scientifique et discuter de la nature d’un discours
     
    Montrer comment le travail des scientifiques permet de disposer de modèles et d’arguments qui peuvent orienter les décisions publiques (voir aussi exemple cycle 4)
    code couleur niveau classe pour contenu enrichi

    Pour ces différents objectifs d’apprentissages, des pistes de situations variées et progressives sont proposées et parfois illustrées avec un ou plusieurs exemples sur 1 ou 2 niveaux. Ces exemples correspondent à des situations de classes mises en œuvre par des enseignants de l’académie d’Aix-Marseille ou présentées sur eduscol.  

    - cycle 3 vert,

    - cycle 4 rouge,

    - seconde jaune,

    - cycle terminal bleu.