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Publié le 30 oct. 2022 Modifié le : 3 nov. 2022

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Le  dimanche 30 octobre 2022

La théorie de la charge cognitive

Présentation de la théorie de la charge cognitive : historique, définition et piste de différenciation pour les apprentissages

  • charge cognitive

    Historique de la notion

    La théorie de la charge cognitive s'est développée en psychologie à partir des années 1960 alors que le behaviorisme fait loi. Le behaviorisme part du principe que l'acquisition des connaissances s'effectue par paliers successifs via des renforcements positifs (récompenses). A cette époque, les chercheurs veulent établir une mesure objective de la charge mentale et la définir en fonction de la tâche. Ils s'appuient sur le paradigme de la double tâche, au cours duquel les participants sont soumis à deux tâches qu'ils doivent réalisés simultanément : une tâche principale fixe et une tâche secondaire dont la difficulté varie (voir J. Leplat et J.C. Sperandio, La mesure de la charge de travail par la technique de la tâche ajoutée, l'année psychologique, 1967, pp255-277).


    La psychologie du travail et l'ergonomie vont apporter dans les années 1970, un tournant décisif à l'étude de la charge mentale en donnant une place centrale à 2 composantes de la charge : l'effort et la stratégie qui ont un effet différent sur la réalisation d'une même tâche chez 2 individus. Alors on distingue les capacités générales de l'individu et la capacité limitée de traitement de l'information plus universel. Cette notion a permis la construction de modèles de mémoire de travail, dont celui de Baddeley et Hitch en 1974 toujours utilisé et que A. Baddeley a fait évolué en 2000 avec une nouvelle composante consistant à récupérer les informations de plusieurs types différents, parfois plusieurs en même temps, afin de les consolider en mémoire à long terme, et également pour faire le lien entre ces deux types d'informations (voir A. Baddeley, Le buffer épisodique, nouvelle composante de la mémoire de travail? 2000, http://psychologie-cognitive.blogspot.com/).

     

    Nouveau modèle de la mémoire de travail de Baddeley (2000) 

    Nouveau modèle de la mémoire de travail de Baddeley (2000)

    Source : http://psychologie-cognitive.blogspot.com/2010/08/baddeley-2000-le-buffer-episodique.html

     

    Dans les années 1980, la charge cognitive se définit en fonction de deux concepts fondamentaux : la mémoire de travail et l'attention. Les chercheurs essaient de comprendre les mécanismes à l'œuvre dans les phénomènes de charge mentale. En 1988, Sweller propose une théorie de la charge cognitive qui postule que la mémoire a plusieurs composantes, la mémoire sensorielle, la mémoire de travail et la mémoire à long-terme (voir A. tricot, Charge cognitive et apprentissage. Une présentation des travaux de John Sweller). 

     

     

    Schéma des composantes de la mémoire, repris et traduit de Mayer et Moreno (2007) 

    Schéma des composantes de la mémoire, repris et traduit de Mayer et Moreno (2007)

    Source : https://edutechwiki.unige.ch/fr/Th%C3%A9orie_de_la_charge_cognitive

     

    Cette théorie reste aujourd'hui un support incontournable de la recherche en éducation afin de :

    • identifier ce qui crée une surcharge cognitive et gêne la construction de nouveaux schémas et, par conséquent, l’apprentissage ;
    • concevoir les différentes techniques pour diminuer les charges cognitives intrinsèque et extrinsèque, tout en augmentant la charge cognitive pertinente puisqu’elle est utile à l’apprentissage.

     

    Architecture cognitive

    La théorie de la charge cognitive s'appuie sur l'hypothèse généralement admise en sciences cognitives de l’architecture cognitive partagée en plusieurs systèmes de mémoire : mémoire sensorielle, mémoire de travail et mémoire à long terme.

    schéma fonctionnement de la mémoire 

    Alors, l’apprentissage constitue un ensemble des processus qui permettent à un individu d’acquérir des connaissances qui viendront enrichir son système mémoriel dit mémoire à long terme.

    La mémoire de travail, elle, permet à la fois l'utilisation des connaissances que l'individu possède déjà et le traitement des informations nouvelles.

    Les processus qui permettent de combiner les connaissances et les informations nouvelles permettent la construction des connaissances nouvelles, qui pourront, à leur tour, être encodées dans la mémoire à long terme. Ce travail cognitif de construction des connaissances nouvelles, que l'on peut décrire en utilisant le terme générique de réflexion, nécessite du temps, de l’effort et ne garantit pas à coup sûr la qualité des connaissances élaborées qui guideront l'action. 

    Modèle simplifié de la mémoire d'après L. Chanquoy, A. tricot et J 

    Modèle simplifié de la mémoire

    D'après L. Chanquoy, A. tricot et J. Sweller, La charge cognitive - Théorie et applications, 2007, ed Armand Colin

    Lors de l’apprentissage, l’information nouvelle est traitée par la mémoire de travail, qui la combine avec les connaissances antérieures de l’apprenant, puis la transfère dans la mémoire à long terme sous la forme d’un schéma qui pourra ultérieurement être récupéré par la mémoire de travail dans la réalisation d’une tâche. Ce sont ces schémas qui permettent de demeurer dans la limite de capacité de la mémoire de travail puisque peu importe la complexité de ce dernier, il sera traité comme un seul élément par celle-ci. 

      

    Apprentissages primaires et secondaires

    Une des avancées majeures pour la théorie de la charge cognitive a eu lieu en 2008 alors que le chercheur David C. Geary a établi une distinction entre les connaissances primaires et secondaires. Les connaissances primaires sont celles que l’on acquiert de façon naturelle : parler, marcher, reconnaître des expressions faciales, etc.

    Quant aux connaissances secondaires, ce sont celles qui nécessitent un enseignement, des efforts et de la motivation de la part de l’apprenant : lire, écrire, compter, etc.

     

    A. Tricot, dans Apprentissages scolaires et non scolaires avec le numérique, Administration et éducation, n°152, 2016, pp.33 à 39 présente sept différences entre les apprentissages scolaires et non-scolaires liés au numérique, en insistant sur la différence entre les apprentissages non-scolaires quand ceux-ci concernent des connaissances secondaires (dont fait partie le numérique) ou des connaissances primaires (dont ne fait pas partie le numérique) :

     

    Sept différences entre les apprentissages adaptatifs de connaissances primaires, les apprentissages adaptatifs de connaissances 

    Sept différences entre les apprentissages adaptatifs de connaissances primaires, les apprentissages adaptatifs de connaissances secondaires, et les apprentissages scolaires

    Source : https://www.cairn.info/revue-administration-et-education-2016-4-page-33.htm

     

     

    Types de charge cognitive

    La charge cognitive intrinsèque

    Elle concerne la complexité de l’information qui doit être apprise par l’apprenant et elle est déterminée par le degré d’interactivité entre les éléments qui doivent être traités en même temps par la mémoire de travail, mais aussi par le niveau de connaissances de l’apprenant. En effet, il est pertinent de croire qu’une même quantité d’éléments en interaction pour un novice pourrait représenter un seul élément pour un expert qui disposerait d’un schéma en mémoire à long terme qui intègrerait tous ces éléments.

     

    La charge cognitive extrinsèque

    Elle est liée à tous les processus cognitifs inutiles, à tous les éléments que l’élève doit traiter, mais qui ne sont pas nécessaires à la construction de schémas. Cette charge est souvent causée par des tâches d’apprentissages mal organisées, mal présentées ou encore qui contiennent des informations confuses ou superflues.

     

    La charge cognitive pertinente

    Elle est directement liée aux ressources de la mémoire de travail que l’apprenant utilise pour acquérir les connaissances et construire des schémas. « L'acquisition et l'automatisation de schémas nécessitent des ressources cognitives et imposent donc une charge cognitive. Dans ce cas, la charge cognitive est pertinente, dans le sens où elle est utile à l'apprentissage (Sweller, van Merriënboer & Paas, 1998). » (Chanquoy, Tricot & Sweller, 2007).

    Source : https://wiki.teluq.ca/wikitedia/index.php/Th%C3%A9orie_de_la_charge_cognitive

     

    Théorie de la charge cognitive et différenciation pédagogique

    A. Tricot, Quelles pistes concrètes proposer pour adapter les situations d'apprentissage diapocharge cognitive 

    Source : Conférence de consensus CNESCO de 32min à 1h03min

    A. Tricot, Quelles pistes concrètes proposer pour adapter les situations d'apprentissage ?

    Lien de téléchargement de la présentation et lien vers l'intégralité de la conférence

     

    André Tricot donne de nombreuses pistes de différenciation en fonction du profil des élèves : élèves en difficulté ou élève plus en avance pour le même apprentissage visé :

     

      

    Elève en difficulté pour l'apprentissage visé

    Elève en avance pour l'apprentissage visé

    Différenciation de la consigne

    Ne pas trop spécifier le but du problème, indiquer plutôt à l’élève qu’il doit atteindre tous les buts qu’il peut atteindre, faire tout ce qu’il sait faire.

    Spécifier le but du (même) problème.

    Différenciation du raisonnement

    Donner à l’élève le problème résolu et lui demander d’étudier la solution Alterner les problèmes résolus et les problèmes à résoudre.


    Donner le problème avec une solution partielle.

    Donner le (même) problème à résoudre.

    Différenciation des supports

    Intégrer physiquement les informations que l’élève devra mettre en relation mentalement pour rendre cette information intelligible.


    Eliminer toutes les informations inutiles ou décoratives.


    Présenter les sources d'information que l’élève devra mettre en relation dans des modalités différentes (auditive et visuelle).

    Éviter la redondance : ne pas répéter inutilement ce qui peut être présenté une seule fois d’une seule manière.

    Différenciation de la tâche 

    Si l’information à présenter est complexe (beaucoup d’éléments et de relations), alors la présenter progressivement, partie par partie.

    Présenter le tout d’emblée plutôt que par parties, pour que l’élève puisse apprendre les relations entre les sections.

    Diversification des supports

    Varier les exemples, avec parcimonie en début d'apprentissage.

    Ne pas présenter d’information transitoire continue (oral, vidéo) ; présenter plutôt des informations statiques, faire des pauses aux moments pertinents et guider l’attention sur les parties pertinentes.

    Présenter l’information avec beaucoup de variabilité pour que l’élève puisse apprendre quelles variables sont pertinentes et quelles ne le sont pas.

    Présenter de l’information transitoire continue (oral, vidéo).

    Différenciation du processus

    Faire disparaître le guidage progressivement.

    D’emblée, ne pas guider, laisser l’élève explorer librement.

    Différenciation de l'autonomie

    Demander à l’élève de mémoriser les relations les plus importantes.

    Demander à l’élève de s'auto expliquer les relations les plus importantes.

    Différenciation des modalités

    Proposer du travail en groupe (selon un scénario précis) quand l’apprentissage visé est éloigné des élèves ; sinon, le travail peut être réalisé seul.

    Si l’accès aux connaissances d’autrui est nécessaire, alors le travail en groupe est utile.
    Sinon, le travail individuel peut être mis en œuvre.

    Différenciation de la démarche

    Mettre en exergue ce qui est important
    Expliciter les liens entre les parties d’un tout.

    Ne pas tout expliquer : engager les élèves dans des activités de production d’inférences, d’hypothèses, de conjectures.

     

    couverture livre charge cognitive

     

    Pour aller plus loin

    Lucile Chanquoy, André Tricot et John Sweller, La charge cognitive, 2007, Ed. Armand Colin – Col.U

    Qu'est-ce que la charge cognitive ? Les fondements cognitifs des phénomènes liés à la charge cognitive. La théorie de la charge cognitive. Domaines d'applications et mesures de la charge cognitive.